Wednesday, October 04, 2006

LECTURES INTERESSANTES

Voici trois ouvrages pour ceux qui désirent entrer en dissidence...



LA FABRIQUE DU CRETIN

La mort programmée de l'école
Jean-Paul Brighelli


Texte de l’éditeur :
« Nos enfants ne savent plus lire, ni compter, ni penser. Le constat est terrible, et ses causes moins obscures qu'on ne veut bien le dire. Un enchaînement de bonnes intentions mal maîtrisées et de calculs intéressés a délité en une trentaine d'années ce qui fut l'un des meilleurs systèmes éducatifs au monde. Faut-il incriminer les politiques, les profs, les parents, les syndicats, les programmes ? En tout cas, la Nouvelle Pédagogie a fait ses « preuves » : l'école a cessé d'être le moteur d'un ascenseur social défaillant. Ceux qui sont nés dans la rue, désormais, y restent. Dès lors, que faire ?
Jean-Paul Brighelli analyse avec une lucidité féroce, sans nostalgie exagérée, cette école de la réussite devenue si souvent école de l'échec programmé et donne des solutions pour une école de demain. Normalien, agrégé de Lettres, il a, du collège à l'université, parcouru l'essentiel du paysage éducatif. Longtemps impliqué dans l'édition scolaire et para-scolaire, il en démonte au passage les mécanismes et les intérêts convergents. »



L'HYPOCRISIE PEDAGOGIQUE
Laurent Demoulin


Texte de l’éditeur :
« Quand il s'agit d'enseignement, deux discours se font face. D'un côté, le grognement réactionnaire de ceux qui appellent de leurs vœux le grand retour de l'autorité patriarcale. De l'autre, le babil mièvre, contradictoire et hypocrite de la pédagogie dominante, qui, malgré ses bonnes intentions, cause de nombreux dégâts en refusant aux enseignants toute forme de légitimité. Et pendant ce temps, dans les classes, les professeurs et les élèves éprouvent de plus en plus de difficultés à vivre ensemble… Dans ce texte virulent, ironique, drôle et grave, l'auteur démonte avec verve ces deux discours. Il s'en prend notamment au décret « Missions de l'école », dont il démonte les contradictions et les dérives. Ensuite, il cherche une troisième voie en réfléchissant aux notions de tiers institutionnel et d'expert. »

Les premières pages peuvent être consultées sur…
http://www.talus.be/prlignes/070.pdf#search=%22hypocrisie%20p%C3%A9dagogique%22



LA DÉFAITE DE LA PENSÉE
Alain Finkielkraut


Texte de l’éditeur :
« Le rêve des Lumières
est-il révolu ? Le progrès, la pensée, la culture peuvent-ils encore constituer un quelconque espoir ? Déjà, Freud parlait du "malaise de la culture", mais la culture de masse du crépuscule du XXème siècle nous rend encore plus sceptique à une véritable démocratisation de la culture. Finkielkraut nous livre un brillant essai, s'interrogeant sur les causes d'un état des lieux inquiétant. »






LES RELATIONS ENTRE COLLEGUES DE TRAVAIL (1)

par B. Demonty
"L'enfer, c'est les autres !"

C'est en tout cas ce que Sartre faisait dire à l'un de ses personnages dans Huis clos.

Pourquoi cette épigraphe ?

Face à l'insistance de quelques amis et face à la richesse du matériau(1) qui se présente à mes yeux, je me suis engagé à rédiger une série de "post" sur le sujet.

Pour commencer la série, je me contenterai de présenter deux principes fondamentaux qui, s'ils sont respectés par tous, transformeront de manière positive certaines relations professionnelles.


Pour le premier, je vous renverrai au blog d'un ami et au célèbre texte des trois tamis : http://ledernierdesmohicans.blogspot.com
A méditer d'urgence et à appliquer sans craindre d'effets secondaires.
Le deuxième principe est inspiré de la Bible : au lieu de voir la paille dans l'oeil du voisin, regarde la poutre dans le tien. L'esprit y est, pas la lettre. Si quelqu'un possède le texte, je suis intéressé. D'une manière générale, cela invite à privilégier l'introspection et la réflexivité personnelle au jugement à l'emporte pièce porté sur autrui.
Et bien souvent, comme disait ma grand-mère, "on n'est noirci que par un noir pot" ! Cette sagesse populaire pourrait trivialement se lire ainsi : occupe-toi de tes bretelles avant de vouloir remonter celle des autres. Ou vérifie d'abord si tes oignons sont mangeables avant de critiquer ceux du voisin. Ou encore, préoccupe-toi d'abord d'être moins c... chaque jour, plutôt que de traiter l'autre de c... Mais je m'égare...
De plus, on ne connaît pas vraiment ses collègues et ce n'est pas parce qu'on les côtoie quelques minutes par jour, même depuis de nombreuses années, qu'on peut se vanter de tout savoir à leur sujet.

Evitons donc les phrases commençant par : "Il est..." ; "C'est une..." ;"Lui, c'est le spécialiste de..." ; "Elle n'apprendra jamais à...". Tout au plus pourrait-on dire de quelqu'un qu'il "se montre" comme ceci ou comme cela. Et c'est déjà s'avancer beaucoup, car incontestablement on ne voit que ce que l'on s'attend à voir...

Evitons donc d'enfermer les gens dans des catégories qui ne sont que des projections de notre représentation du monde, pas le monde.

En thérapie systémique, on insiste particulièrement là-dessus : on dit que "la carte n'est pas le territoire". Une carte n'est qu'une représentation plus ou moins complète du territoire, mais en aucun cas une copie fidèle.

Et l'on n'a pas besoin d'être un thérapeute systémicien pour appliquer ce principe au jour le jour et devenir donc... un peu plus humain ?

(1) Enseignant moi-même, j'ai beaucoup d'amis enseignants et mon épouse, "maître spéciale" de langues dans le primaire, travaille dans quatre écoles. Ce ne sont donc pas les "anecdotes" qui manquent !

Monday, October 02, 2006

ENFIN UN COMMENTAIRE !

Un de mes collègues, que j'estime beaucoup, m'a envoyé ce mail. Je pense qu'il est intéressant que chacun le lise :

"Salut Ben,

Je suis pas arrivé à placer mon comment sur ton blog alors je te l'envoie en direct.
Attention tout de même à ne pas confondre pensée unique et cohérence pédagogique. Un débat ouvert a lieu avant la prise de décision. Par la suite, chacun, élève ou prof, trouve avantage à ce qu'on ne tiraille pas dans toutes les directions. Non ?"

Premièrement, je remercie vivement ce collègue d'avoir ouvert la discussion.

Je le rappelle : il faut que le système se réapproprie la dynamique dont il s'est laissé déposséder (lire le post Manifeste pour une trêve sacrée) !

Les enseignants – mais aussi les parents et les élèves – doivent relancer la réflexivité sur l'Ecole, dont ils ont été tenus éloignés, quelle que soit leur opinion.

Deuxièmement, j'aimerais répondre ceci :

S'il y a effectivement débat d'idées, au terme duquel on parvient à un "métapoint de vue" (un peu dans l'acception que donne à ce terme le philosophe Edgar Morin), il y a cohérence pédagogique dans l'application des décisions, bien sûr. Puisqu'il y a débat – donc confrontation de point de vue idéologiques divers – on ne peut parler de "pensée unique".

Par contre, il y a, à mon sens, pensée unique dans trois contextes bien précis :

- D'abord, quand le système-décideur est constitué d'amis, choisis pour leur optique commune, et qu'il considère que la confrontation avec les idées provenant d'autres systèmes n'est pas nécessaire, voire est une perte de temps et d'énergie.

Le débat d'idées présente, dans l'idéologie actuelle du "temps qui presse", un double désavantage : il exige une énergie psychique importante et il inscrit toute décision dans une autre temporalité.

- Ensuite, quand le débat d'idées est faussé dès le départ, les décisions ayant déjà été prises en amont.

Quand Meirieu explique l'échec des réformes pédagogiques en France par le fait "qu'elles n'ont pas suffisamment été expliquées aux enseignants", il s'inscrit dans cette optique. Le débat ne porte pas sur l'essence des réformes. Il consiste simplement à convaincre les destinataires des réformes.

- Enfin, quand le débat en question est organisé dans un espace
[1]-temps tel qu'il est impossible à une majorité de personnes de s'y rendre.

On en conclura alors, avec une pleine et entière mauvaise foi, que chacun a eu l'occasion de s'exprimer ! Les absents ayant toujours tort, ils seront par la suite condamnés au silence : il n'avaient qu'à être présents !

Pour conclure, gardons toujours à l'esprit que cette pensée unique n'est qu'une idéologie, mais une idéologie qui se présente comme une observation neutre et objective de la "réalité".

Elle tend à faire croire que les postulats de départ de leur argumentation sont des vérités. Elle entretient une confusion entre opinion et fait. Or les prémisses étant fausses, la conclusion ne peut pas être valide.

Je citerai comme exemple de ces postulats (n'oublions pas qu'un postulat est une "proposition que l'on demande d'admettre comme principe d'une démonstration, bien qu'elle ne soit ni évidente ni démontrée"
[2]) :

- la transférabilité des célèbres compétences transversales (qu'elles portent ce nom-là ou un autre) ;
- le modèle grammatical comme modèle idéal de l'enseignant d'une langue étrangère ;
- la "toute-puissance" de la gestion mentale, qui n'est qu'une modélisation intelligente d'un mode de fonctionnement particulier sinon singulier, sans aucune légitimité apportée par les sciences cognitives ;
- l'inutilité des "dictées" dans l'apprentissage de l'orthographe ;

- etc.

Chacun pourra continuer la liste...

[1] A la distance physique, géographique, ajoutons la distance symbolique chère à Bourdieu.
[2] http://www.lexilogos.com/francais_langue_dictionnaires.htm